L’art et la manière de cuisiner les épices, par Olivier Roellinger [Le Figaro Madame].

Dire qu’il y a quelque temps, assaisonner un plat se limitait pour nous [enfin pour moi 🙂 ] à l’usage d’un poivre et de sel.

Nous avons découvert au fil de notre apprentissage qu’il existait une foultitude d’épices, d’aromates capables de vous réveiller les papilles sans forcément les retourner. Nous avons appris à les doser, à jouer parfois les apprentis sorciers.

Nous avons trouvé chez Olivier Roellinger, un bon compagnon. Nous tenons à préciser qu’il n’existe aucun partenariat. D’ailleurs, notre blog en est dépourvu. Ce n’est pas l’esprit que nous cultivons. Nous avons été sensible à la démarche de ce grand Chef qui à su rendre ses étoiles pour prendre entre autres choses, la route des épices.

Nous avons commencé par acheter un moulin. Outil essentiel car il vous permet de conserver jusqu’au dernier moment tous les arômes contenus dans chaque grain de poivre.

De plat en plat, nous avons appris à jouer avec les différents flacons de grains de poivres mais aussi les différents piments: leur parfum et leur puissance.

Nous aimons aussi découvrir les différents mélanges qu’il propose. Il y a toujours un petit ingrédient qui va faire chanter un plat d’une manière un peu inattendue.

Nous ne pourrions plus nous passer de la Poudre des Bulgares.

Dans l’article ci-dessous, Olivier Roellinger donne quelques précieux conseils.

« Comment se mettre aux épices et les utiliser au quotidien ? Lesquelles choisir ? Le chef nous en parle avec passion, livrant de nombreux conseils pratiques pour mettre enfin de l’audace dans nos plats.

En ce moment

«Les épices sont à la cuisine ce que la ponctuation est à la langue française. Comme la ponctuation révèle les mots, les épices permettent de révéler la face cachée des mets», annonce Olivier Roellinger en guise d’introduction. Le chef cancalais est connu pour avoir fermé son restaurant gastronomique triplement étoilé en 2008, en pleine gloire. L’idée était notamment de prendre le temps de transmettre au plus grand nombre sa passion pour les épices. Pour lui, les épices permettent une cuisine moins grasse, moins salée et riches en bienfaits, ainsi que de redécouvrir des aliments simples. «Avant d’être bon au palais, il faut que cela soit sain pour le corps, c’est ce que l’on pense avec ma femme depuis trente-cinq ans», explique-t-il. Et de nous donner les conseils pour s’y mettre, avec l’art et la manière.

Les épices, ça se mélange

Lorsqu’on utilise des épices c’est généralement pour suivre une recette trouvée dans un livre de cuisine du monde, ou pour saupoudrer timidement une préparation (du cumin sur des carottes ou du curcuma sur des pommes de terre, par exemple). Pourtant pour Olivier Roellinger, les épices n’ont d’intérêt que si elles sont mélangées : «prenez le ras el-hanout ou le garam masala, dans les pays qui les cuisinent au quotidien, ce sont des épices associées à d’autres», explique celui qui se considère comme un constructeur de saveurs. En Inde, curry signifie d’ailleurs littéralement mélange d’épices en langue tamil. Comme pour un parfum, il faut trouver les associations qui nous plaisent.

Cuire les épices, oui mais pas n’importe comment

Les épices ne s’utilisent pas au même moment de la cuisson, selon que l’on mijote, grille ou snacke un ingrédient. La règle d’or ? Ne pas dénaturer celles qui sont fragiles : «il faut veiller à ne pas brûler le produit qui perdrait alors ses qualités gustatives et nutritionnelles», alerte Olivier Roellinger. Ses conseils.

Pour le chef Olivier Roellinger, les épices n’ont d’intérêt que si elles sont mélangées.

 

Pour un plat mijoté : «on fait revenir des échalotes, des carottes ou un oignon émincé dans de la matière grasse. Lorsque la « tombée » devient translucide, on met une cuillère à café d’épices, on laisse s’imprégner cinq secondes puis on déglace – avec vinaigre, eau ou vin».
Pour une soupe : «on ajoute la même cuillère à café d’épices, à mi-cuisson», idem pour une nage ou un bouillon.
Pour une marinade : «pour une viande, une épaule ou un carré d’agneau, par exemple, on met une cuillère d’huile d’olive pour une cuillère à café d’épices, on étale le mélange puis on laisse une heure au réfrigérateur avant de cuire», conseille l’expert. Et pour le poisson ? «la chair étant plus fine, c’est le même principe mais on laisse macérer 5 à 10 minutes seulement. Je conseille de le réchauffer avec du gingembre et de la coriandre en poudre, mais aussi avec des graines de fenouil – pour un poisson gras, on peut ajouter du sumac».
Pour une grillade : «si la cuisson est rapide, on peut mettre les épices avant ; pour une grillade longue, une côte de bœuf par exemple, il faut les utiliser à la fin pour ne pas les brûler», explique-t-il avant de conseiller : «mon équation idéale pour une côte de bœuf ? Deux à trois poivres, un de Madagascar, un poivre blanc et un poivre long, plus du cumin torréfié».

Les épices dans les desserts

Quand on pense épices, on pense salé et plus rarement aux desserts, à l’exception de la vanille, bien sûr. «Attention à l’utilisation de la vanille, prévient Olivier Roellinger, elle s’utilise comme une base, elle met en relief, mais elle ne doit pas être trop présente.» Il conseille par ailleurs de récupérer les gousses utilisées pour un dessert afin d’agrémenter une vinaigrette ou même une blanquette. «On coupe 1 cm de la gousse, pas plus, et on l’ajoute au plat», conseille-t-il. Si un champ des possibles s’offre à nous avec la vanille, il ne faut pas s’en contenter. Le poivre est par exemple très intéressant pour faire «swinguer» les desserts. Le chef en recommande deux pour se lancer :

Le poivre rouge : «son goût de caramel, de Barbapapa et de sucre cuit est très appréciable dans les desserts»
Le poivre sansho japonais : «le poivre sansho d’hiver et ses notes de citron vert seront idéaux dans un yaourt ou un cheesecake et le sansho d’été, parfait avec le chocolat».

Il faut oser et faire ses propres tests

On l’aura compris, en matière d’épices, il faut se montrer un peu aventurier et se lancer en créant ses propres associations. «C’est exactement comme avec parfum, on peut commettre deux erreurs : ne pas en mettre assez – personne ne le remarque – ou s’asperger avec», sourit notre expert. «Le jeu c’est de les associer et là, les combinaisons sont infinies et merveilleuses ; moi j’y joue depuis trente-cinq ans», poursuit-il. On commence donc avec des petites quantités que l’on augmente au fur et à mesure, jusqu’à trouver le dosage qui nous convient. On se méfie de l’ail qui n’est pas facile à marier et on se lance en ne s’empêchant pas d’y associer des herbes de Provence ou même des algues séchées.

Pour commencer, Olivier Roellinger nous conseille des mélanges simples.

Le classique : gingembre + coriandre en poudre + piment (il en existe plus de 300 variétés, à vous de trouver celle qui sied votre palais).
Pour les légumes : cannelle + muscade + genièvre.
Pour les pâtes : cardamome verte + gingembre + thym ou origan.
Pour à peu près tout : cumin + coriandre + fenouil (c’est bon dans un fromage blanc ou sur un croque-monsieur).
Pour les fruits rouges : gingembre en poudre + anis vert.
Pour les pommes et les poires : safran + cannelle + poivre.

Les épices à avoir absolument dans son placard

Pour se constituer une collection de base, nous avons demandé à celui qui est l’un des plus grands experts français d’établir une liste d’épices indispensables. C’est tout en poésie qu’Olivier nous a répondu : «Je commencerais par la perle, le poivre noir, la charmeuse, la cannelle, la voluptueuse, la muscade, l’impertinente, la coriandre, l’espiègle, le clou de girofle, la fraîcheur, la cardamome, l’élégance, le poivre long rouge, le cumin, comme un beau brun, le fenugrec pour sa chaleur, le gingembre poudre pour son ardeur, le noble piment guajillo du Mexique, le poivre Andaliman et le safran».

Ne pas acheter ses épices n’importe où

La question que tout non connaisseur se pose maintenant : dois-je jeter mes épices qui proviennent du supermarché ou puis-je me contenter des produits proposés par le «monsieur qui se décarcasse» ? Pour Olivier Roellinger, la qualité d’une épice réside avant tout dans sa fraîcheur. «En moyenne, le poivre consommé par les Français est vieux de 5 ans, ce qui est inconcevable, ça veut dire que certaines personnes consomment du poivre vieux de 10 ans», tempête le chef chez qui les mélanges sont faits en petite quantité, toutes les trois semaines, pour garantir des propriétés gustatives idéales. Son conseil, acheter ses épices dans des magasins spécialisés qui proposent des épices fraîches et éviter absolument les stands avec des épices en vrac : «les gens éternuent dessus, les poussières volent… il y a des règles d’hygiène et de qualité à respecter», explique le professionnel.

Concernant le prix, mieux vaut acheter moins d’épices mais en acheter de bonne qualité, «à savoir que certaines, comme la vanille ou le piment d’Espelette, sont plus chères en grandes surfaces», poursuit celui pour qui il est important de fixer des prix justes, y compris pour le producteur. «Acheter à un prix responsable c’est aussi faire vivre celui qui est à la base de la chaîne et ne pas l’asphyxier, comme peuvent le faire certaines grandes enseignes», explique le voyageur qui travaille avec pas moins de 1200 petits producteurs dans le monde entier.

Attention à la date de péremption

Qui n’a jamais retrouvé un vieux pot d’épices au fond de son placard en se demandant s’il était possible de dépasser la date de péremption ? «Les vieilles épices ne sont pas mauvaises pour la santé – vous ne tomberez pas malade en les ingérant puisqu’elles contiennent des bactéricides et des fongicides naturels – mais elles n’ont aucun intérêt gustatif», explique le chef, qui se bat pour promouvoir la fraîcheur et vient de lancer l’opération «Coup de vent dans vos tiroirs et vos armoires à épices !», dans le but d’inciter les consommateurs à faire le tri. «S’ils ne les utilisent pas c’est que soit ils ne les aiment pas, soit ils ne savent pas les utiliser, ce qui est dommage – il ne faut pas hésiter à demander des conseils», explique-t-il. Que faire alors de ses épices périmées ? «Un pot-pourri, associé à des pommes de pin par exemple». À bon entendeur.

Retrouvez les épices d’Olivier Roellinger sur son site Épices-roellinger.com et en magasin, à Paris, Cancale et Saint-Malo.« 

 

A présent, à vous de jouer aux apprentis sorciers.

Avec gourmandise, C&V.

4 commentaires

  1. Lunesoleil dit :

    A reblogué ceci sur L'actualité de Lunesoleilet a ajouté:
    J’utilise de plus en plus les épices que l’on retrouve dans la cuisine orientale, indienne, dans le nord de l’Afrique, partout dans le monde.
    Dans l’ayurveda les épices ont une place de choix, les épices aident à la digestion et sont reconnues comme plante médicinales.
    J’aime bien découvrir de nouvelles saveurs dans mes plats. Dernièrement j’ai acheté épice Fenouil, j’ai hésité avec la Funegrec.
    J’ai encore de la coriandre fraiche l’hiver je la rajoute dans ma soupe de légumes maison, du Massalé dans mon plat Réunionais, Ras El Hanout pour le Coucous, Cannelle pour la Tarte aux pommes et plein d’autres comme le Gingembre, Cunion, Curcuma, Curry .
    Hier j’etais dans le rayon des épices, chez les Chinois, j’ai repéré les étoiles de Badiane, les graines de Cardamone, de l’Anis … facilite la digestion.
    D’après ce que je viens de lire, mieux vaut privilégier les épices en graines que moulues. Tout ça pour vous dire que j’aime les épices qui me font du bien et vous ??

    1. Approuvé et partagé…;-) !

  2. ellea40ans dit :

    Merci pour cet article super interressant. Les épices restent encore mystérieux pour moi. Il faut du temps pour apprendre à les dompter. Cet article va beaucoup m aider. Bon dimanche

    1. Jouer les apprentis chimistes est une aventure gustative passionnante… Bon Dimanche!

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